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Crépuscule de dimanche d'été
Une belle journée, un calme crépuscule
Dans l'odeur des rôtis les promeneurs heureux
Rentrent, sans se douter que tout est ridicule,
Et fouettent du mouchoir leurs beaux souliers poudreux.

Ah! banale rancœur de notre farce humaine!
Aujourd'hui, jour de fête et gaieté des faubourgs,
Demain le dur travail, pour toute la semaine.
Puis fête, puis travail, fête... travail... toujours.

Par l'azur tendre et fin tournoient les hirondelles
Dont je traduis pour moi les mille petits cris,
Et peu à peu je songe aux choses éternelles,
Au-dessus des rumeurs stupides de Paris.

Oh! tout là-bas, là-bas... par la nuit du mystère,
Où donc es-tu (depuis tant d'astres!) à présent...
Ô trombe chaotique, ô Nébuleuse-mère,
Dont sortit le Soleil, notre père puissant ?

Où sont tous les soleils qui, sur ta longue route
Bondirent, radieux, de tes flancs jamais las ?
Ah! ces frères du nôtre, ils sont heureux sans doute!
Et nous ont oubliés! ou ne nous savent pas.

Comme nous sommes seuls, pourtant, sur notre Terre,
Avec notre infini, nos misères, nos dieux,
Abandonnés de tout, sans amour et sans Père,
Seuls dans l'affolement universel des Cieux!

Jules Laforgue

1ère publication:
Œuvres Complètes (Mercure de France) 1903

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