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Complainte de l'organiste de Notre-Dame de Nice (1)
Voici que les corbeaux hivernaux
Ont psalmodié parmi nos cloches,
Les averses d'automne sont proches,
Adieu les bosquets des casinos.

Hier, elle était encor plus blême,
Et son corps frissonnait tout transi,
Cette église est glaciale aussi!
Ah! nul ici-bas que moi ne l'aime.

Moi! Je m'entaillerai bien le cœur,
Pour un sourire si triste d’elle!
Et je lui en resterai fidèle
À jamais, dans ce monde vainqueur.

Le jour qu'elle quittera ce monde,
Je vais jouer un Miserere
Si cosmiquement désespéré
Qu'il faudra bien que Dieu me réponde!

Non, je resterai seul, ici-bas,
Tout à la chère morte phtisique,
Berçant mon cœur trop hypertrophique
Aux éternelles fugues de Bach.

Et tous les ans, à l'anniversaire,
Pour nous, sans qu'on se doute de rien,
Je déchainerai ce Requiem
Que j'ai fait pour la mort de la Terre!

Jules Laforgue

1ère publication:
Œuvres Complètes (Mercure de France) 1903

Nota: Ce poème ne fait pas partie du recueil "Les Complaintes"

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