Frêle sous ses bijoux, à pas lents, et sans voirSur l'Hélène de Gustave Moreau
Tous ces beaux héros morts, dont pleurent les fiancées,
Devant l'horizon vaste ainsi que ses pensées,
Hélène vient songer dans la douceur du soir.« Qui donc es-tu, Toi qui sèmes le désespoir? »
Lui râlent les mourants fauchés là par brassées,
Et la fleur qui se fane à ses lèvres glacées
Lui dit : Qui donc es-tu ? de sa voix d'encensoir.Hélène cependant parcourt d'un regard morne
La mer, et les cités, et les plaines sans borne,
Et prie : « Oh! c'est assez, Nature! reprends-moi!Entends ! Quel long sanglot vers nos Lois éternelles! »
- Puis, comme elle frissonne en ses noires dentelles,
Lente, elle redescend, craignant de « prendre froid ».Jules Laforgue
1ère publication:
Poésies Complètes (Le Livre de Poche) 1970