1ère publication:Avril brodé aux buissons des robes de printempsSpleen de printemps (1)
Et met aux boutons d'or leurs blanches collerettes,
La mouche d'eau sous l'œil paisible des rainettes
Patine en zig-zags fous aux moires des étangs.
Des canotiers déjà braillent dans les guinguettes.
- Dans mon cœur souffle encor l'hiver et ses autans.Aux baisers du soleil le bourgeon luisant crève
En calice enivré de rosée et de sève
Où se fourrent l'abeille et les frelons goulus.
Des nids chantent au cœur des vieux troncs vermoulus.
Partout, du renouveau le murmure s'élève.
- Seul mon cœur desséché ne refleurira plus.Le liseron s'enroule étoilé de clochettes
Aux volets peints en vert des blanches maisonnettes.
Le réséda, l'œillet et le muguet aussi
S'ouvrant au soleil chaud avec un air transi
Embaument la fenêtre étroite des grisettes.
- Au jardin de mon cœur ne vient que le souci.Et la main dans la main, avec des mines mièvres,
Par les jardins publics les couples d'amoureux
Roucoulent vers l'azur des duos langoureux.
Tout aime, tout convie aux amoureuses fièvres,
Tout rit, tout est content de vivre sous les cieux.
- Seul, j'erre à travers tout, le dégoût sur les lèvres.Jules Laforgue20 mai1880.
Nota: Voir
> Spleen et printemps.